Tour d’horizon – Suède et Estonie

Introductions

Focus sur les modèles sociaux et sociétaux

Focus sur les politiques environnementales et la sensibilité du public et des entreprises

Focus sur le bois et les ressources forestières

Focus sur la mobilité

Focus sur la ville

Focus sur les politiques environnementales et la sensibilité du public et des entreprises

Le modèle social suédois

C’est plus particulièrement en Suède que nous avons fait le choix d’étudier l’approche originale du modèle social. Ainsi, le « modèle suédois », fondé sur la négociation entre partenaires sociaux, la prise en compte de leur importance par le gouvernement, la place déterminante des conventions collectives dans le droit du travail et un rôle fortement redistributeur de l’Etat, a été profondément affecté par la crise du début des années 90, caractérisée par l’effondrement d’une bulle immobilière, une hausse brutale du taux de chômage et des déficits publics importants. Néanmoins, la Suède possède l’un des niveaux de vie les plus élevés au monde. Cependant, le taux de chômage (6,9%), bien qu’en baisse, reste une préoccupation. Les jeunes sont particulièrement touchés. D’une manière générale on note peu de sensibilité aux licenciements. Récemment 3000 salariés d’Ericsson ont été licenciés sans provoquer de réaction particulière des citoyens suédois.

La culture suédoise accorde une grande importance aux idées progressistes telles que l’égalité raciale et des sexes, les droits des homosexuels, la liberté de presse et d’expression, la transparence du gouvernement, la protection de l’environnement et les droits des travailleurs.

Une régulation assurée par l’office de l’environnement du travail.

La Suède présente l’originalité de disposer d’un office de l’environnement de travail. C’est une autorité administrative missionnée par le gouvernement et le parlement suédois responsable de l’application par les entreprises et les organisations des lois sur la santé et sécurité au travail.

Les missions de l’office suédois de l’environnement du travail consistent principalement à adopter des règlements détaillés basés sur la loi-cadre sur l’environnement de travail  et les lois relatives à la santé et sécurité au travail ; à contrôler les entreprises et les organisations sur le respect de ces  lois ; à animer et coordonner un réseau de partenaires constitué de  représentants du gouvernement, des employeurs et des salariés.

Le gouvernement et le parlement suédois ont confié ces missions à l’autorité suédoise de l’environnement du travail, afin de s’assurer que le milieu de travail satisfait aux exigences énoncées dans la législation sur la santé et la sécurité au travail pour que tout salarié puisse travailler dans un bon environnement de travail, en constante amélioration. L’employeur porte la principale responsabilité concernant l’environnement de travail.

Cet  office public permet certainement à la Suède de maintenir une qualité de vie au travail des plus efficientes des pays européens. Cette attention de longue date portée à l’environnement de travail fait de la qualité de vie au travail un non-sujet en Suède.

Un taux de syndicalisation des salariés de 70%.

Le modèle suédois combine la flexibilité pour les entreprises avec la sécurité et le pouvoir d’exercer une certaine influence pour les employés. Les accords sont négociés généralement pour trois ans, permettant ainsi de s’adapter avec les différentes variables. Les conventions sont considérées comme « un  plancher, pas un plafond ».

Le syndicat Unionen est le plus important de la Suède sur le marché du travail privé et le plus grand syndicat des cols blancs dans le monde. Le syndicat totalise plus de 600 000 membres, dont 30 000 sont des représentants élus dans plus de 60 000 entreprises et organisations de toutes les tailles.

Le niveau d’adhésion syndicale est élevé en Suède – environ 70 % – et l’adhésion est d’ailleurs souvent encouragée par les employeurs.

La régulation du travail en Suède est minimale: les conventions collectives constituent la base du « modèle  suédois» dans lequel les conditions de chaque secteur sont déterminées par les syndicats et les organisations patronales. Le gouvernement n’intervient pas, bien qu’il puisse fixer des limites par la législation du travail, du fait que les syndicats et les organisations d’employeurs en assument la responsabilité.

Le lieu de travail est le champ d’action le plus important du syndicat Unionen. C’est sur le terrain que le syndicat apprend sur les conditions de travail réelles et qu’il trouve des idées pour proposer des changements et des améliorations.

Dans le modèle Suédois, les employeurs, les employés et leurs représentants organisent une coopération afin de créer un environnement de travail optimal, sain et sécurisé ; en appoint avec les accords déjà existants.

Un syndicat patronal très libéral et cependant social par nature.

Selon le syndicat patronal suédois Svenkst Näringsliv au positionnement très libéral, les grandes entreprises suédoises telles H&M, Volvo, Scania, intègrent largement les problématiques de développement durable comme un facteur clé de compétitivité. La responsabilité sociale de l’entreprise est remontée en gouvernance dans les grandes entreprises, parfois au niveau du Comité Exécutif, principalement dans les secteurs dans lesquels les consommateurs sont les plus sensibles au sujet.

Le point de vue du syndicat est que la réglementation n’est pas un bon moyen d’engager des politiques ambitieuses en matière de développement durable et sociétal ; la réglementation devient rapidement le standard, et les acteurs s’en satisfont et ne progresseront pas plus avant.

Sur le plan social : employeur et salarié s’accordent sur la priorité à la compétitivité comme principal facteur de pérennité. Par ailleurs, l’état socio-démocrate maintient des standards sociaux élevés, qui ne font pas débat.

La position, dans le discours des acteurs économiques, du modèle social suédois paraît quant à lui un socle solide et commun aux différentes parties prenantes : patronat, salariés et état.

L’économie sociale et solidaire

En Suède, illustration sur l’accompagnement des migrants

La Suède pratique traditionnellement une politique d’accueil des réfugiés très généreuse (81 000 personnes accueillies en 2014, 163 000 en 2015), soit le taux le plus élevé de l’UE si on ramène ces chiffres à sa population. Ses capacités d’accueil ayant néanmoins atteint leurs limites (en matière de logement notamment), Stockholm a durci sa législation en matière d’asile et provisoirement rétabli les contrôles aux frontières. La Suède est le pays de l’OCDE où les inégalités se sont le plus aggravées depuis les années 1990. Les disparités entre les Suédois et les habitants d’origine étrangère sont énormes. Longtemps connue pour sa politique d’immigration libérale, la Suède a fermé ses frontières et durci sa politique d’accueil. Le pays reste néanmoins celui qui a reçu le plus de réfugiés par habitant de l’Union européenne. Miljon Bemanning, une entreprise de recrutement fondée par des personnes ayant vécu cette situation de migration, a développé des services destinés aux migrants pour les accompagner efficacement dans leur intégration dans l’emploi.

Estonian Social Enterprise Network

En Estonie, où tous les organes de fonctionnement du pays ont dû être construits ex nihilo en 1991, il n’existait aucun acteur significatif de type « charity » ou ONG à but social. Le Social Enterprise Network a pour mission d’accompagner vers le succès les entreprises de l’économie sociale et solidaire. Le réseau travaille en partenariat avec le ministère de l’intérieur, et est considéré comme faisant partie du secteur public.

Les politiques pour l’emploi et les politiques sociales sont intégrées en un plan nommé “well-being development plan” 2016 – 2023 et l’entrepreneuriat social en fait partie.

Le réseau rassemble 49 entreprises, à business model équilibré, avec l’obligation de réinvestir l’intégralité de leurs profits. Les entreprises sont actives dans les domaines de l’emploi, de l’aide aux familles, de l’action en faveur des communautés locales. Elles se répartissent 20% production, 80% services.

Les schémas de financement sont typiquement 40% appels d’offres publics, 40% venant du privé, 20% subventions.

Le réseau travaille sur des indicateurs permettant d’évaluer la performance de l’entrepreneuriat social.

L’investissement sur les jeunes est important. La priorité du réseau est d’accompagner la société et en particulier les jeunes pour devenir des consommateurs responsables, des entrepreneurs du secteur social et solidaire ou des acteurs responsables d’entreprises conventionnelles.

RETUNA : un centre commercial, une ambition sociétale

Autre illustration, un projet alliant l’intégration de personnes  éloignées de l’emploi et récupération et mise en valeur d’objets usagés. Retuna est un centre commercial associé à un centre municipal de collecte des déchets, dans la ville d’Ekilstuna, au nord de Stockholm.

Le concept du centre est issu d’une intention politique de quelques élus de la commune, alliant initiative sociale avec l’emploi de travailleurs en difficulté, et diffusion d’une culture de la deuxième vie des produits. Cette offre attractive de produits de consommation à bas prix cible non seulement une population à faible pouvoir d’achat notamment issue de l’immigration récente mais aussi des consommateurs engagés. Cela crée une réelle mixité sociale dans un lieu de consommation agréable, soigné et répondant aux standards de centres commerciaux plutôt haut de gamme.

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